Le Boulevard des Italiens



























Toute la ligne des boulevards, que l'on peut parcourir sur l'impériale d'un omnibus (15 c.ligne E), est, de
chaque côté, plantée d'arbres entre lesquels se dressent un trop grand nombre de kiosques de journaux,
d'édicules de nécessité pour hommes, de colonnes d'affiches.  Des refuges, avec des candélabres dont
plusieurs sont garnis d'horloges pneumatiques, sont établis de distance en distance, au centre de la
chaussée.  Aux points les plus encombrés, des gardiens de la paix interrompent la circulation des
voitures pour permettre aux piétons de traverser.  Enfin, de nombreux cafés ou brasseries, avec leurs
rangées trop envahissantes de tables et de chaises à l'extérieur (ce qu'on appelle la terrasse), achèvent de
donner aux boulevards un aspect d'animation tout particulier..

Dans le fond, à gauche, au coin de la rue Drouot et du boulevard Montmartre, le Café-Viennois.  "Fondé
par M. Spiess en 1901, il dut sa naissance au succès du fameux Restaurant Viennois de l’exposition
Universelle de 1900.  Dans un des plus beaux immeuble de Paris, M. Bernier, l'éminent architecte de 1
'Opéra-comique, a réalisé un décor de haut goût, à la fois luxueux et distingué, que tous les étrangers de
passage à Paris veulent connaître.  Par le mouvement, par le pittoresque et par l'élégance, le Café-
Restaurant Viennois occupe dans la vie de Paris une place tout à fait à part, et les têtes couronnées en
voyage incognito ne dédaignent pas de venir s’y asseoir, dans le voisinage des lettrés, des artistes, des
businessmen de tous les pays, pour goûter aux spécialités viennoises et à l'excellente cuisine de la
maison.  Deux grandes figures disparues, le roi de Suède Oscar, et Léopold Il, roi des Belges, y sont venus
plus d'une fois.

(Le Figaro Illustré.  Numéro spécial, avril 1910)

La rue comprise entre le boulevard et la rue Pinon (rue Rossini en 1850) reçut, en 1847, le nom de Drouot,
général de division mort la même année.  Quatre ans plus tard, une première série de travaux prolongea la
rue Drouot ' jusqu'à la rue de Provence.  Une deuxième série la prolongea, en 1858, jusqu'à la rue La
Fayette.  Au numéro 1 se trouvait jadis l'ancien hôtel Grammont, propriété du vicomte de Morel-Vindé,
qui devint plus tard dépendance de l'Opéra de la rue Le Peletier.  Le Jockey-Club se trouvait installé au
numéro 2, de 1836 à 1857.  Isidore Pleyel, célèbre facteur de pianos, y logea également de même que la
danseuse Taglioni.  Arthur Meyer y fonda le journal Le Gaulois à la fin du dix-neuvième siècle.  Les
numéros 3 et 5 appartinrent au duc de Choiseul.  L'hôtel du numéro 3 fut Ministère de la Guerre en 1793.  
L'Etat-Major s'y installa sous le Directoire.  La Garde Nationale l'occupa sous Louis-Philippe,
l'administration de l'Opéra, sous Napoléon III. L'hôtel du numéro 6 fut transformé en mairie du 2ème
arrondissement en 1848, lequel devint le 9ème en 1860.




























Les places d'impériale sont très agréables et les femmes peuvent y monter.  Les places de plate-forme sont
très recherchées des fumeurs.  Une plaque de verre transparente le soir apposée au-dessus de la portière
et portant le mot "complet" indique au public que toutes les places d'intérieur et de plate-forme sont
occupées.  La Compagnie Générale des Omnibus vient de créer plusieurs lignes d'omnibus automobiles.  
Le tarif reste le même (30 c et 15 c) ainsi que le service des correspondances."

Paul JOANNE.  Paris. 1907